Un vent féministe visite la mythologie – Sirène debout de Nina Mc Laughin et Pallas de Marine Carteron

Il y a quelques jours, j’ai refermé Sirène debout, de Nina Mc Laughin. Et c’est un livre que je vous recommande chaudement. Si la mythologie vous fait rêver, si vous avez envie de découvrir le point de vue des femmes dans ces histoires, si vous aimez les réécritures et n’avez pas peur de rencontrer un Polyphème qui envoie des mails ou une Eurydice star de rock, vous pouvez vous lancer. J’ai commencé par feuilleter le livre, puis j’ai lu une première histoire (Callisto), une deuxième (Daphné), et une troisième (Baucis). Il n’était ensuite plus question de le remettre dans les rayonnages et j’en ai fait l’acquisition. D’ailleurs la couverture réalisée par les éditions La Volte est très réussie, ce qui ne gâche rien et a sans doute contribué à mon envie de l’installer sur ma table de chevet. Nina Mc Laughin écoute les personnages féminins de ces récits, elle plonge dans leurs psychés, dans leurs histoires et en ressort à chaque fois une voix singulière et un décor. Cela donne des versions originales et très incarnées de ces mythes bien connus. Certaines voix sont plus réussies que d’autres, certaines voix plus glaçantes (j’étais prévenue, mais après avoir terminé l’histoire de Philomèle et Procné, j’ai mis un peu de temps à m’endormir), mais dans l’ensemble, c’est une réussite. De temps en temps, je sortais des rayons de ma bibliothèque la version d’Ovide (dans la belle traduction de Marie Cosnay aux éditions de l’Ogre, un livre magnifique là encore), pour aller lire ou relire ses versions de l’histoire que je venais de terminer. Maintenant que le livre est fermé, les voix qui le composent me restent en tête, et crient avec insistance que ces récits lus et racontés tant de fois peuvent l’être avec des points de vue différents. Ils nous parlent à travers le temps, et peuvent encore nous accompagner, s’ils sont racontés avec les bons mots, ce qui est le cas dans Sirène debout.

Je repense aussi à un autre livre, dans la même veine mythologique, sorti en avril aux éditions du Rouergue dans la collection Epik (qui regroupe des romans dédiés à l’imaginaire, à destination des ados et des jeunes adultes). Il s’agit de Pallas – Dans le ventre de Troie de Marine Carteron. C’est un tome 1, cela signifie qu’il y aura un tome 2 j’espère car j’ai beaucoup aimé ce premier volume. Nous sommes à Troie, cinquante ans environ avant la guerre que nous décrit Homère dans l’Iliade. Marine Carteron se penche sur les causes de ce conflit sanglant et sur toutes les ramifications des querelles engagées par les dieux et les déesses de l’Olympe. Elle écrit très bien, d’une écriture brève et contemporaine qui pourtant garde la trace des mots employés dans les textes antiques qu’elle a abondamment lus et dont elle donne une bibliographie instructive à la fin du récit. Tout en balayant d’un sacré vent frais toutes ces histoires anciennes, elle réussit à nous mettre dans l’ambiance de la cité des Dardanides. Une ambiance plutôt cruelle car dans les histoires mythologiques, les meurtres et les viols sont monnaie courante. Et ici encore, c’est le point de vue des femmes qui est mis en valeur. Deux femmes en particulier parlent abondamment, Pallas, nymphe et amie d’Athéna, accidentellement tuée par celle-ci, et Hésione, fille de Laomédon que ce dernier n’hésite pas à enchaîner à un rocher pour la sacrifier au monstre Ceto. Bref, du sang, des intrigues incroyables, des héroïnes puissantes, une écriture qui tient la route, ça donne un cocktail qui déboîte et on en reprendrait bien une bonne rasade.

Elise

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