Le plus souvent, j’ouvre un livre sans avoir lu la quatrième de couverture, de peur que quelque phrase indélicate me dise d’emblée ce que je dois penser de l’ouvrage en question, ou me révèle de façon intempestive la fin de l’histoire avant même que j’ai pu l’apprivoiser. Fidèle à cette habitude, j’ai donc ouvert Totalement inconnu à l’aveuglette, sans savoir du tout à quoi m’attendre. Et c’était très bien comme ça ! De même je voudrais vous parler de ce livre sans trop en dire, mais ce n’est pas facile. Si j’en dis trop peu, rien ne vous poussera spécialement à l’ouvrir, et ce serait dommage. Totalement inconnu, c’est une voix, celle d’une réceptionniste, qui déroule un long monologue. Et elle nous entretient de tout ce qui lui passe par la tête. Son boulot, ses amis, les histoires de guerre de son grand-père, la grammaire, les voix qu’elle entend et qui lui font faire toutes sortes de choses un peu étranges, et bien sûr, le soldat inconnu… L’écriture est sobre, le style épuré et la matière des phrases oscille entre gravité et absurde. Au fil des pensées décousues, se forment des paysages traversés (ou pas – ainsi la narratrice connaît tout de la Finlande sans jamais y avoir mis les pieds), des questions ( Que sait-on de la mort ? Comment sait-on ce qu’on sait ?), des visages (celui d’Yvette, sa grand-mère malicieuse). Et c’est un très beau voyage dans la langue, en compagnie d’une voix discrète et déterminée qui décale les regards vers l’étrange du quotidien.

Paru le 25 août aux éditions Christian Bourgois

Conseil lecture Elise