Par un coup du hasard (ou pas, justement) j’ai commencé à remplir mes étagères d’imagiers en même temps que mes placards de vêtements faits mains. Pour l’un et l’autre, la passion était déjà bien inscrite auparavant, mais elle s’est, à un moment, exprimée de façon motivée, structurée : je voulais faire les choses bien, avoir les vêtements les plus beaux et les mieux finis, les imagiers les plus intelligents et les plus attachants.
D’Agnès Rosenstiehl, je ne connais ni n’apprécie pas tant la si célèbre Mimi Cracra (bien que, certainement, je pourrais m’en faire une amie en la connaissant bien). Je tiens en revanche le reste de son œuvre pour incroyablement juste, pertinente, tendre … géniale. Elle a écrit et illustré un bon nombre d’imagiers : Les Noms, Les Verbes, Les Adjectifs (Larousse des Tout Petits en trois volumes), une série sur les couleurs, un imagier Les Fleurs que J’aime que je rêve d’acquérir, Les Machines qui Roulent (que j’avais enfant et me suis empressée de trouver en seconde main), et enfin, pour en venir au fait, le merveilleux Les Habits que J’aime.
(Et certainement bien d’autres dont je n’ai malheureusement pas connaissance).
Les Habits que J’aime présente, organisés par catégories (« Dans l’armoire », « Au porte-chapeau », « La nuit », …), tous types de vêtements. TOUS types de vêtements. Même les plus méconnus ou insolites, à juste titre dirais-je, tels (« le Kabig », « le Caraco », « le Pagne », « les Mocassins », …).
En le lisant, je reconnais l’intérêt de l’imagier pour le goût qu’on prend aux mots en eux-mêmes, les avoir (justement), presque les collectionner, s’en faire une réserve secrète et (pourquoi pas) oubliée, les garder pour le jour où, les aimer pour leur étrangeté ou leur familiarité, s’ouvrir avec eux à ce que nous ne verrons jamais, construire une histoire à leurs côtés, en avoir un souvenir, anticiper la lecture des romans sombres et des grandes épopées … tout cela qui rend l’imagier essentiel (de mon point de vue) à l’éveil des très jeunes enfants. Pour le dire d’une façon moins certaine encore : il me semble que l’imagier serve à les/nous entourer d’un monde qui a du sens d’abord, depuis toujours, avec des images et des traits et une interprétation – d’où l’intérêt de choisir les meilleurs imagiers. Et ceux d’Agnès Rosenstiehl en font partie.
Pour les vêtements, au-delà, après, avant ou en dépit (je ne sais plus bien) du simple goût pour les tissus, leurs couleurs, leurs bruits quand ils se froissent, les bobines de fil mélangées, le ronron de la machine à coudre, tout le petit matériel (épingles, dés à coudre, pieds presseurs, craies de tailleurs, …), et simplement la diversité des gestes de la couture. Au-delà, après, avant ou en dépit de tout cela donc, il y a chez moi le goût pour construire un vêtement, y penser, avec l’idée première, les contraintes physiques qui se présentent rapidement, le patron à choisir, les reprises à y faire, le tissu, sa doublure, l’énigme des tissus techniques, les finitions hong-kong, et, pour la fin les boutons, le ruban, que sais-je … créer un vêtement qui, d’une idée originale et très intime devient une pièce artisanale. (Est-ce que c’est un goût pour la mode ? mystère …)
Au croisement il y a, forcément, une envie étrange et bien agréable de coudre comme un imagier de vêtements, avoir tout cousu (et je dois reconnaître que pour certaines pièces le plaisir est plus du côté de leur conception et de leur couture qu’à les porter). Je veux tout essayer (à quoi sert tel vêtement), tout comprendre (comment c’est fait ?), … Je veux tout. Je ne me lasse jamais de feuilleter l’imagier d’Agnès Rosenstiehl et d’imaginer de nouveaux vêtements.
Place aux images !
Article de Juliette, illustration de l’article « Mes cousettes ».
Génial! Sensible et humoristique . Bravo