Le bateau-usine de Kobayashi Takiji

Ce roman a été écrit au Japon en 1929 par Kobayashi Takiji, figure de la littérature prolétarienne japonaise qui mourra quelques années plus tard torturé dans un commissariat.

Le livre décrit les conditions de vie des marins et des ouvriers embauchés par un bateau-usine, bateau qui part pêcher le crabe au Nord du Japon, à la frontière des eaux russes. Les ouvriers et les marins, qu’aucune réglementation ne protège, sont corvéables à merci et leur vie ne vaut pas plus cher que celle d’un des nombreux poux qui leur dévore le crâne.

Kobayashi Takiji n’a pas choisi de suivre l’histoire d’un personnage, mais plutôt d’évoquer les travailleurs du bateau comme un héros collectif. Ce procédé dégage une grande froideur, renforcée encore par une écriture violente et dénuée de pathos. Le bateau-usine entend délivrer un message, un message communiste, un message de révolte, c’est presque un manuel qui appelle à l’action collective. Certains écrivains, en cherchant trop à convaincre, négligent la qualité littéraire de leur oeuvre. Ce n’est pas le cas de Kobayashi Takiji qui à aucun moment ne met en danger la finesse de son écriture. Le style est élégant, frappant, le récit se déroule comme un film d’Eisenstein, en superposant des images fortes.

L’ouvrage a été redécouvert au Japon en 2008, dans un contexte de précarité sociale. Nombre de jeunes japonais se sont reconnus dans les personnages mis en scène par ce roman, et le livre s’est vendu à des milliers d’exemplaires. On voit là la puissance du Bateau-usine, texte capable de traverser les générations sans une ride et de toucher juste, pile où ça fait mal.

 

Disponible aux éditions Allia, avec une excellente postface de la traductrice Evelyne Lesigne-Audoly qui situe Kobayashi Takiji, le contexte social d’écriture du livre et l’écho qu’il suscite dans la société japonaise actuelle.

Elise

Illustration de l’article : image extraite du film Kanikōsen de Sō Yamamura, 1953.

Un commentaire Ajoutez le votre

  1. Didier Caprini dit :

    effectivement édifiant ! les choses ont-elles pour autant changé au Japon ou ailleurs ? peut-être un peu dans la forme ……….mais dans le fond ?

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